Note d’actualité : garantir l’assurabilité des collectivités territoriales
Garantir l’assurabilité des collectivités territoriales
En début d’année 2025, environ 1.500 communes n’étaient pas assurées. La situation est particulièrement préoccupante, notamment en raison des sinistres de grande envergure pouvant intervenir en lien avec le dérèglement climatique.
A ce sujet, il faut souligner une double parution :
- Le Guide de la Direction des affaires juridiques (DAJ) du MINEFI en juillet dernier ;
- Le Livre blanc de l’Association des Petites Villes de France (APVF), Villes de France et SMACL Assurances, ce 11 septembre 2025.
1. La Direction des affaires juridiques (DAJ) a donc publié un nouveau guide consacré aux marchés publics d’assurance des collectivités territoriales et de leurs groupements.
Ce guide s’appuie sur trois documents :
- Un rapport d’information du Sénat intitulé « Garantir une solution d’assurance aux collectivités territoriales » et daté de mars 2024 ;
- Un rapport de Jean-Yves Dagès et Alain Chrétien daté d’avril 2024 effectué sur mission du gouvernement, et dans le double objectif de reconstruire le dialogue et rétablir la confiance entre les collectivités et les assureurs
- Un avis de l’autorité de la concurrence en date du 23 janvier 2025 portant sur la situation concurrentielle dans le secteur de l’assurance de dommage aux biens des collectivités territoriales, sur saisine du président de la commission des finances du Sénat.
Dans ce guide pratique, la DAJ part du constat que le secteur des assurances est fortement concentré et manque d’attractivité, ce qui complique la passation de marchés publics d’assurance, plus précisément, pour l’assurance dommage aux biens.
Les dépenses d’assurance augmentent considérablement dans un contexte financier particulièrement difficile pour les collectivités.
L’objectif du guide publié par la DAJ est de proposer des solutions susceptibles d’améliorer la situation et de contribuer au retour d’une relation de confiance entre assureurs et collectivités.
Pour la DAJ, cette amélioration de la situation doit passer par une meilleure identification des risques à couvrir et des besoins de la collectivité, pour identifier les couvertes d’assurance pertinentes. En ce sens, le développement de la prévention et de la formation doit permettre de maîtriser leur sinistralité.
L’amélioration de la situation passe également par une bonne rédaction des pièces du marché, et par la favorisation des échanges lors de la phase de consultation.
Les procédures de passation de marchés publics d’assurance s’avèrent régulièrement être infructueuses ; la DAJ formule diverses recommandations pour permettre à la collectivité concernée de résoudre cette problématique.
Enfin, l’exécution du marché public d’assurances peut également contribuer à l’amélioration des relations entre assureurs et collectivités, de la phase d’application des stipulations contractuelles à celle d’éventuel gestion des différends.
Ce guide pratique est accompagné de différents outils pour faciliter l’action des collectivités en la matière.
Même si un changement des pratiques peut contribuer à améliorer et sécuriser la passation et l’exécution des marchés publics d’assurance, il conviendrait de préciser les dispositions du Code de la commande publique applicable aux marchés publics d’assurance, tel que le recommande l’autorité de la concurrence dans son avis du 23 janvier 2025.
2. L’Association des Petites Villes de France (APVF), Villes de France et SMACL Assurances ont pour leur part, ce 11 septembre 2025, publié un Livre blanc sur ce sujet.
Ce Livre blanc est articulé autour de l’optimisation, de la prévention et de l’anticipation pour répondre au « défi » de l’assurabilité.
- Optimiser la passation des marchés publics d’assurance
On y retrouve plusieurs propositions relatives à la passation des marchés publics d’assurance, dont celles de meilleure définition des besoins par une meilleure connaissance du patrimoine et de l’exposition aux risques de l’acheteur.
On retrouve également la recommandation de favoriser les variantes, pour permettre aux assureurs de proposer une solution alternative à l’offre de base ajustée aux risques et besoins exprimés par l’acheteur. En d’autres termes, l’idée est que les marchés publics d’assurance deviennent de véritables « contrats sur mesure ».
- Renforcer la prévention des risques
Une meilleure gestion des risques ne peut qu’améliorer la situation.
Pour ce faire, le Livre blanc recommande de développer la sensibilisation et la formation des agents en la matière, d’élaborer une cartographie des risques, et surtout, de créer un nouveau poste de gestionnaire des risques qui serait rattaché à la direction générale des services, pour doter les acteurs locaux d’une ingénierie efficace.
La prévention des risques doit également passer par une meilleure communication entre collectivités et assureurs ; la mise en place de rendez-vous périodiques peut ainsi y contribuer.
S’agissant du financement de la prévention, le Livre blanc recommande la création d’un guichet unique regroupant les dispositifs de financement disponibles, et d’élargir le périmètre des dispositifs de financement existants pour soutenir tous les sinistrés.
- Anticiper l’avenir
Les risques se multiplient et doivent être anticipés, avec le soutien de l’Etat.
Le Livre blanc formule la recommandation de mettre en place un régime de réassurance publique pour le risque d’émeutes et de mouvements sociaux au regard du coût représenté par les violences urbaines pour les collectivités.
Au-delà de formuler des recommandations à destination des collectivités et des assureurs, le Livre blanc s’adresse également aux pouvoirs publics nationaux et européens dans le but d’améliorer et renforcer le cadre existant en matière d’assurance.
La recommandation la plus importante tend à la révision de la directive européenne 2014/24/UE relative à la passation des marchés publics, pour y intégrer les services d’assurance dans la catégorie des marchés sociaux et autres services spécifiques.
L’objectif serait de généraliser le recours à la procédure adaptée qui offre plus de souplesse à l’acheteur public que la procédure formalisée. En recourant à une procédure adaptée, l’acheteur peut par exemple recourir à la négociation, pour renforcer le dialogue entre collectivités et assureurs, ce qui est formellement interdit par le Code de la commande publique pour un appel d’offres par exemple.
En lien avec la prévention, le livre blanc recommande d’améliorer la lisibilité des plans de prévention et de gestion des risques et de généraliser les dispositifs de préventions.
Il recommande également de réviser le Code des assurances pour permettre une indemnisation incluant l’amélioration de la résilience du bâti, pour s’adapter à l’augmentation des risques climatiques.
Enfin, le Livre blanc suggère d’intégrer les risques climatiques dans l’aménagement du territoire pour renforcer la résilience des territoires. En ce sens, il recommande de renforcer la mission adaptation qui est prévue par le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3), publié en mars 2025, pour venir en aide aux collectivités nécessitant de l’ingénierie territoriale.