Pourquoi la victimisation secondaire est-elle essentielle ?
Pour la première fois en France, le Tribunal correctionnel de Paris a retenu la notion de victimisation secondaire dans son jugement du 13 mai 2025 condamnant Gérard Depardieu à 18 mois d’emprisonnement avec sursis pour des faits d’agression sexuelle.
Dans cette affaire, les juges ont considéré que le préjudice causé à la partie civile, au titre de la victimisation secondaire, a pour origine les propos tenus par le conseil de Depardieu durant le procès.
Au-delà de la polémique engendrée sur ce que peut dire ou non un avocat en audience, la notion de victimisation secondaire ne doit pas être restreinte à cette hypothèse (celle d’un avocat qui pense que ses propos peuvent ne pas avoir de limites).
La victimisation secondaire doit être comprise, de manière plus générale, comme étant la double peine que subissent notamment de très nombreuses victimes de violences sexistes et sexuelles : non seulement elles souffrent de l’agression subie mais, en outre, elles sont confrontées à une réponse inadéquate de la part d’individus ou d’institutions qui leur cause une souffrance supplémentaire.
Prenons l’exemple d’une fonctionnaire qui subit des attouchements de la part d’un collègue. Si elle n’ose pas dénoncer celui-ci auprès de sa hiérarchie qui s’est elle-même illustrée en tenant des propos misogynes, alors cette fonctionnaire souffrira à la fois de l’agression sexuelle et du silence que l’attitude de sa hiérarchie lui impose implicitement.
Pour bien comprendre la spécificité de cette problématique, imaginez que cette même fonctionnaire ait été victime du vol de son téléphone portable au sein de son service. Elle n’aurait assurément pas redouté d’en parler à sa hiérarchie. Il est en effet est peu probable que celle-ci lui aurait répondu qu’elle l’avait bien cherchée parce que son téléphone avait une coque bien trop belle ou parce que le vol d’un portable, ce n’est rien du tout.
Donc il est souvent bien plus facile de dénoncer un vol de téléphone qu’une agression sexuelle.
C’est pour cette raison que la reconnaissance de la notion de victimisation secondaire est essentielle en matière de violences sexistes et sexuelles.
Pour une étude approfondie de la notion de victimisation sexuelle dans la jurisprudence de la CEDH, v. ici