Note d’actualité

L’annulation d’une rupture conventionnelle conclue entre une personne publique et son agent public relève de l’office du juge de l’excès de pouvoir

-CE, 17 octobre 2025, n°493859-

 

Par cet arrêt du 17 octobre 2025 classé en B, le Conseil d’Etat a rappelé que l’acte de recrutement d’un agent public relève du contentieux de l’excès de pouvoir et non de celui du plein contentieux, « eu égard à la nature particulière des liens qui s’établissent entre une personne publique et ses agents publics ».

Ce principe avait été consacré afin de permettre aux tiers ayant un intérêt suffisant d’en demander l’annulation (CE, 30 octobre 1998, n°149662 ; CAA Douai, 24 juillet 2008, n°07DA00198).

L’apport de cet arrêt est que l’application de ce principe est étendue aux actes mettant fin aux fonctions des agents publics, ce qui inclut l’acte signé valant rupture conventionnelle, et ayant pour objet de mettre fin aux fonctions de l’agent public en l’échange du versement d’une somme de 105 219.07 euros.

 

Ainsi, la demande en annulation pour illégalité d’une rupture conventionnelle relève, selon le Conseil d’Etat, de l’office de l’excès de pouvoir ; il en résulte que le juge administratif ne peut être saisi par la personne publique d’un litige de plein contentieux contractuel pour obtenir l’annulation de l’acte signé, sans méconnaître son office.

Or, en l’espèce, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise avait fait droit à la demande de la Chambre des métiers et de l’artisanat, et avait annulé l’acte en exigeant la restitution par l’agent de la somme qui lui a été versée.

Sur appel de l’agent public, le jugement a été infirmé par la Cour administrative d’appel de Versailles, qui a jugé être saisie d’un litige de plein contentieux contractuel et a fait application des règles pour contester la validité d’un contrat administratif dégagées par la jurisprudence Commune de Béziers I (CE, 28 décembre 2009, n°304802).

Au regard du principe qu’il dégage, le Conseil d’Etat annule donc l’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Versailles.

 

Sur le fond, cet arrêt a été l’occasion pour le Conseil d’Etat de rappeler que les personnes publiques peuvent retirer les actes administratifs qu’elles estiment illégaux, et ce, dans un délai de 4 mois.

En conséquence, les personnes publiques ne sont pas recevables à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu’elles ont le pouvoir de prendre, à savoir, dans cette affaire, le retrait de l’acte administratif et la restitution de l’indemnité.

 

Précision issue des conclusions du rapporteur public : l’arrêt s’applique aux ruptures conventionnelles « artisanales », c’est-à-dire les ruptures conventionnelles qui mettent fin à la relation de travail sans que cette possibilité ne soit prévue par un texte.

Le rapporteur public précise qu’il conviendra au Conseil d’Etat d’étendre ou non ce principe aux ruptures conventionnelles conclues en application des textes dans un prochain arrêt sur lequel il a été saisi.

 

Note rédigée par Me CORNELOUP, docteur en droit, avocat associé, et Mallia LELARGE, juriste